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Le Journal d'AncestraL - révélateur à l'acide
29 avril 2014

LA DETTE !

http://www.pauljorion.com/blog/?p=64404

LA DETTE !, par AncestraL

28 avril 2014 par Paul Jorion |

Billet invité. Ce billet sera exceptionnellement ouvert aux commentaires pendant 24 heures, durant toute la journée du lundi 28 avril.

Ceci est un témoignage. Un appel d’air. Voyez-y une photographie. Une confession. Pas une analyse du moment. Un besoin de dégueuler l’horreur de notre Système. C’est le nôtre, quoi qu’on en pense. Pardonnez-moi, tous. J’attends que jeunes et vieux prennent leurs responsabilités et donc leurs armes.

Car voilà plusieurs mois que l’angoisse m’étreint comme jamais. Je n’en dors plus. La semaine prochaine, je serai contraint à la cavalerie bancaire, par ma banque. 4.000 euros. Et je travaille ! Classe moyenne basse, mais divorcé et célibataire, et un enfant. Je me cherche un second emploi ! Je ne vous dis pas tout car j’essaie de mettre du beurre dans les épinards… Et les rappels d’impayés et les immondes menaces d’interdits bancaires, et les prélèvements pour énormes frais de gestion me disent que c’en est trop. C’est horrible de vous écrire ceci, pour mon amour-propre, même si j’en ai peu.

De toutes façons, je ne suis pas adapté à cette société malade. Je ne l’ai jamais été.

« Mon emploi » m’enseigne que les plus malhonnêtes sont les plus riches.

À 34 ans, je vais devoir m’endetter pour… payer une dette – un découvert – auprès de « ma » banque. Je sens que je vais encore ajouter une chaîne à mon cou, et cela fait des mois que je fuis ce moment fatidique. Pourquoi ? Parce que je pense à ma fille. Parce que je me dis que cela ne pourra pas durer plus longtemps. Mais je ne sais pas du tout comment sera ma situation dans deux ans.

Inutile de parler de cela à ma sœur, ni à mon père, qui sont toute ma famille.

Ma sœur et son mari gagnent 4 ou 5 fois mon « traitement ». Classe aisée.

Mes parents, d’humbles ouvriers, ont connu 10 ans de chômage et de maladies dans les années 90. Dix ans d’insécurité alimentaire et locative, et de porte-monnaies troués entretenus par des crédits « revolving ». Ils avaient alors mon âge. Ma sœur a fui cet enfer dès que possible et moi aussi, même longtemps après la mort de ma mère, et en 2009, il a encore fallu sauver de cela mon père. Mes maigres économies – 1.000 euros ! – y sont passées ! Mon père n’a comme seul héritage à nous transmettre que des dettes… et l’amertume d’une vie de parents gâchée royalement.

Malheureusement, mon divorce – sans aucun crédit autre qu’un découvert fatidique – va me coûter cher. J’ai « à tout prix » cherché à ne pas revivre ce que mes parents m’ont fait vivre et c’est comme un immense échec que je me vois revivre cela, que je me vois faire revivre cela à mon enfant… Quelle humiliation… Quelle mort dans l’âme. Vivement le Lotto, le PMU (qu’est-ce que ma mère a pu dépenser comme argent là-dedans – autant d’espoir d’y gagner qu’elle en avait dans Dieu ou l’Horoscope – tant de désillusions perdues dans l’alcool quotidien), vivement que je vende à mon tour mon « Indignez-vous ! » à moi ! Je crois que le nombre de fois où j’ai rêvé de mettre fin à mes jours dépasse de très loin celui où j’ai voulu vivre ma vie.

 

Aussi j’ai décidé de témoigner ici, auprès de ces lecteurs que je connais à peine, des inconnus (sauf ceux qui fréquentent Le Vicomte !) qui comme moi luttent pour leur survie, ou ceux qui ont « bonne fortune ». Comme j’aimerais être de « bonne fortune » ! Je ne l’ai jamais été. Mais comme j’aimerais aussi n’avoir jamais eu à me confronter à ce monde qui n’est pas le mien !

Car plus le temps passe, plus je me dis que cette « merde infernale » dans laquelle nous pataugeons hébétés, anesthésiés par le confort, eh bien, cela n’est qu’une existence d’esclave de la dette et de la consommation. Et je me dis que si nous regagnions notre indépendance, notre autonomie, nos savoir-faire, nous serions de nouveau libres – nous flanquerions donc enfin pour cela aux cachots ou au bagne les « responsables ». Pour cela, il nous faudrait « couper le membre pourri » et « sauter la barrière » comme je l’ai déjà expliqué auparavant. Cependant, l’avenir est plus que noir à l’horizon. En nous tous vivent encore les horreurs du Bois du Cazier. « On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels » a dit Anatole France…

 

Ma réflexion, en ce moment, travaille justement de larges horizons philosophiques, politiques, cosmologiques. Et en vérité, pour qui cherche, après de nombreuses années de recherche, en l’extérieur de soi, apprendra qu’il ne faut rien chercher, car tout est en soi. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela semble simple mais ne l’est pas « en Vérité » (et celle-ci est cruelle). Cela veut dire que nous avons besoin de peu pour « Vivre la Vie » (et non Réaliser une Existence). Les moines bouddhistes définissent ainsi leurs « nécessités » primordiales : un bol pour la nourriture ; deux ou trois robes ; un toit ; les remèdes s’ils sont malades. Pour nous laïcs, nous pourrions ajouter : par exemple de quoi faire nos outils afin de devenir indépendants et autonomes. Pour aller plus loin, nous pourrions envisager qu’une communauté humaine n’est pas nécessaire, mais cette position est très extrême. « C’est la Qualité » qui définira le Monde selon Robert Pirsig dans son Traité du Monde et de l’Entretien des Motocyclettes.

« L’Existence » est une notion, une « valeur » inculquée par la société moderniste. Elle est une notion construite et insufflée par les penseurs de la « République »  car elle est nécessaire pour combler le fait que nous ne vivons pas. Elle l’est car elle est synonyme de consommation. Nous survivons donc, comme esclaves. Majoritairement, nous ne vivons pas « notre histoire personnelle » comme le dit Paolo Coelho. Pire, nous parachevons notre dépendance quand nous devenons dépendants du RSA, CMU, etc. tombant sur l’avant-dernière marche de la « société ». Ensuite c’est SDF – j’ai très peur de le devenir même si je souhaite de ne plus rien posséder pour ne plus être possédé.

Si nous ne consommions pas, nous ne serions pas dépendants du Système et celui-ci s’écroulerait – vouloir l’indépendance est l’unique espoir « pacifique ». Nous rependrions alors notre Liberté. Nous mettrions aux cachots et aux bagnes les personnes qui doivent y être. Nous regagnerions notre Dignité en exploitant de nouveau, non autrui, non l’inconnu du palier voisin, mais cet autre inconnu, également volé par le Système marchand : cet enfant qui dort en nous.

 

Voilà, je vais m’endetter, je vais donner des sous, de l’électronique, je vais emprunter à X pour donner à Y : X va créer magiquement une ligne électronique qu’il va envoyer à Y qui va faire de même. Mais ce sera une chaîne nouvelle pour moi. Cela n’a aucun sens. C’est comme cette photo circulant sur Internet : un cheval attaché à une chaise de jardin en PVC et qui patiente. Le cheval n’a pas idée qu’il peut s’enfuir : non, il est attaché et cela suffit pour son maître. Cela nous suffit non ?

Lundi, après une semaine de congés payés, je vais donc retourner faire ce métier que tout le monde fuit, être payé une misère, je vais remplir une existence gracieusement offerte par mes supérieurs et je ne vivrai pas une vie riche et lumineuse : la mienne. Je ne donnerai à ma fille que cela : l’horizon d’une existence attachée, au mieux, à la dette de la banque et à la chaise de jardin du « travail ». Et je ferai ma demande de crédit pour rembourser une horrible dette. C’est inacceptable de réduire la vie humaine à une dette non ? Pourtant, trois jours de dépenses militaires mondiales suffiraient chaque année à éradiquer la faim dans le monde, et donc, « chaque enfant qui meurt est un assassinat » comme dit Jean Ziegler.

Réveillez-vous : osez, levez-vous, rien n’a plus de poids désormais. Relisez Bellegarigue, et tant d’autres. Nos enfants méritent que nous ayons du courage. L’indépendance est notre espoir.

Je dédie ce billet à ma fille, qui débute sa Vie, et à Annie Le Brun, qui a déjà su comment justifier pleinement la sienne.

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Commentaires
M
Bonjour, <br /> <br /> « Pourtant, trois jours de dépenses militaires mondiales suffiraient chaque année à éradiquer la faim dans le monde », cette phrase m’a vraiment beaucoup touché. Je ne comprends pas non plus comment les grands États laissent les gens dans la misère pour pouvoir faire la guerre ou s’enrichir par d’autres projets tout aussi sombres.
Le Journal d'AncestraL - révélateur à l'acide
  • AncestraL est un jeune homme publiant sur le blog de Paul Jorion. Je suis AncestraL, car ma voie spirituelle et philosophique remonte jusqu'aux voies ancestrales. Ici : billets d'éclairages politiques, sociétals, philosophiques, artistiques et personnels.
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